la documentation du dialogue social

 

 

le néocorporatisme – quelques définitions

 

la définition de l’observatoire

européen des relations industrielles

    EMIRE

http://www.fr.eurofound.ie/emire/FRANCE/NEOCORPORATISM-FR.html

 

(définition de la base EMIRE)

 

Theoretical model for analysing relations between the State and society, used sometimes for descriptive and sometimes for prescriptive purposes. In essence, it consists in the participation of intermediate bodies in social regulation. And in the 1970s at least, it was put forward as one of the responses to the crisis of legal intervention in the modern State.

 

(traduction par AETES)

 

Modèle théorique pour analyser les relations entre l'Etat et la société, utilisé parfois à des fins descriptives et parfois dans un objectif prescriptif. Essentiellement, il consiste en la participation des corps intermédiaires dans la régulation sociale. Dans les années 70, notamment, il a été proposé en tant qu'une des réponses possibles à la crise de la gouvernance publique dans les Etats modernes.

Neo-corporatism constitutes, on the one hand, a system of interest representation which is reduced to a limited number of units or intermediaries to whom the State offers a recognized monopoly, in return for the control which it exercises over their activities. On the other hand, it embodies a form of participation by these recognized groups in the development of public policies: the formulation and application of policies become the product of social concertation, of a pact based on the exchange of mutual advantages between the State and private groups. This interaction fosters the institutionalization of interest groups and entails the delegation of public authority to private actors, which blurs the dividing line between the private and the public spheres.

 

le néocorporatisme se caractérise, d'une part, par un système de la représentation des intérêts qui est réduit à un nombre limité d’intervenants à qui l'Etat offre un monopole reconnu, en échange duquel  il est en droit d’exercer un contrôle sur leurs activités. D'autre part, il incarne une forme de participation de ces groupes reconnus à l’élaboration des politiques publiques : la formulation et l'application des politiques deviennent le produit de la concertation sociale, d'un pacte basé sur l'échange d’avantages mutuels entre l'état et les groupes privés. Cette interaction stimule l'institutionnalisation des groupes d'intérêt et entraîne une délégation de l’autorité publique à des acteurs privés, ce qui brouille la ligne de division entre les sphères privées et publiques.

It could not be said that France has had any real experience of neo-corporatism, given the absence of any global organization of social interests and of general and permanent processes of bargaining. The State, by way of a technostructure which is strong and equipped with a modernization programme, retains a very real autonomy; furthermore, French society is strongly "sectorized", a situation which engenders, rather, a phenomenon of sectoral (neo-) corporatisms.

 

Il ne saurait être dit que la France a déjà réellement expérimenté le néocorporatisme, faute d’une organisation unifiée des intérêts sociaux et d’existence de processus globaux et permanents de négociation. L'état, du fait d’une technostructure forte et engagée dans un programme de modernisation, garde une véritable autonomie; en outre, la société française est fortement "sectorisée", situation qui engendre, plutôt, l’apparition de (néo-) corporatismes sectoriels.

 

 

néocorporatisme et pactes sociaux

observatoire social européen

http://www.ose.be/files/osepaper/pactesocial.pdf

 

VERS UN PACTE SOCIAL EUROPEEN ?

Philippe POCHET, observatoire social européen

citation extraite de Working Paper n° 16 – Mars 1997

 

Qu'est-ce qu'un pacte social ?

C'est un accord sur des objectifs considérés comme communs (ex. le progrès économique) dont chacune des parties retire un bénéfice dépendant de l'attitude des autres et dont la réalisation est tributaire de leur pouvoir à faire respecter les règles du jeu. Il suppose le partage d'une même vision (rôle de l'économie de marché et de ses institutions) fondée sur un corpus de connaissance considéré comme légitime de part et d'autre. (…). Pour qu'il y ait un pacte social, il faut tout d'abord qu'il y ait des partenaires sociaux, c'est-à-dire des acteurs qui acceptent de partager des responsabilités.(…) La littérature universitaire parle plus volontiers de corporatisme ou de néo-corporatisme. Il s'agit [suivant la définition de Léo PANITCH, YORK University, TORONTO, Canada] d'  « une structure politique du capitalisme avancé qui intègre les groupes socioéconomiques de production organisés par l'intermédiaire d'un système de représentation et de coopération au niveau des dirigeants et d'un système de mobilisation et de contrôle social vis-à-vis de leurs membres ».

 

qu’est-ce donc que le « corporatisme » ou « doctrine corporative » ?

 

Les chercheurs en science politique et sociale ont coutume, à juste titre, de caractériser le modèle social émergeant au sein de l’union européenne comme étant un système « néocorporatiste » ; le « néo-corporatisme » fait bien sûr référence à un certain renouveau de la doctrine « corporatiste » au stade de développement de nos sociétés ; le fait qu’un usage contemporain de l’adjectif « corporatiste », caractérisant l’attitude consistant à vouloir, pour une catégorie, défendre ses intérêts corporatifs envers et contre tous, a occulté le sens originel du mot, à savoir la dénomination d’une doctrine économique et sociale dont le principal promoteur en Europe tout au long du siècle dernier aura été l’église catholique (depuis la lettre-encyclique Rerum Novarum du pape Léon XIII sur « la condition des ouvriers », en date du 15 mai 1891, première des « encycliques sociales » donnant corps à ce qu’il sera convenu d’appeler la « doctrine sociale » de l’église catholique romaine) ne facilite pas la compréhension.

 

Puissent ces quelques citations significatives des promoteurs de la doctrine corporatiste contribuer à clarifier cette théorie de la « collaboration sociale étatiquement assistée » au service de la mise en œuvre du « bien commun ». Ces citations sont structurées par thèmes qui traiteront successivement des fondements de la doctrine, de l’entreprise dans la société corporative, du corporatisme et des classes sociales, de la doctrine corporatiste de l’Etat, et enfin de la fin des corporations (révolution française) et du retour du corporatisme.

 

Les Fondements de la doctrine

 

1 « La plus haute vertu du corporatisme est sans doute sa conformité aux lois du droit naturel. Pour vivre, pour assurer sa subsistance, l’homme doit fournir un effort, accomplir une conquête sur la nature. »

Maurice BOUVIER-AJAM, La doctrine corporative

 

2 « Les éléments humains sont mis en place par la nature qui attend d’eux l’effort. Ils sont placés par voie d’autorité dans des cadres donnés, des sociétés naturelles. Il ne s’agit pas de sociétés contractuelles, réalisées par l’accord des hommes en vue du meilleur service des intérêts, de quelques-uns ou d’une plus noble cause. Il s’agit de sociétés assignées à l’homme par la nature comme cadres de vie, champs d’action, lieux d’exercices des devoirs, cercles intermédiaires entre l’homme et l’univers.

 

Ces unions naturelles de personnes sont nécessairement composées d’êtres inégaux, la nature n’ayant pas accordé les mêmes capacités aux membres de ces unités de collaboration. La Famille, société naturelle typique parce qu’incontestable, a par nature sa loi, qui est de vivre et dont découlent les obligations et les droits de ses membres. Il ne s’agit pas d’un contrat mais de l’acceptation d’une loi, source de devoirs perceptibles par toutes les consciences. Ces membres ont une hiérarchie, qui nécessite la prise en considération des facultés et le rôle de chacun, ce que nous appellerons la répartition des devoirs dans l’unité de collaboration. La société familiale a son bien commun, que le chef doit rechercher : ses membres ont entre eux un lien d’union morale, fruit d’un mutuel consentement ( l’acquiescement à la loi naturelle ).

 

L’Etat national a, lui aussi, sa loi ( que traduirait une constitution parfaite ) qui est de vivre et de faire vivre les familles qu’il unit, une hiérarchie ( chef, conseils, services ), un bien commun à procurer à la communauté ( qui est la parfaite suffisance de vie pour les familles qui composent la société civile ), un lien d’union morale source de volontés ( l’acquiescement à la loi naturelle ).

 

La société naturelle nationale complète la société naturelle familiale en lui accordant la suffisance de vie, par les vertus d’une répartition des devoirs dans l’unité de collaboration : cette répartition des devoirs se fait nécessairement par l’intermédiaire des professions. 

 

La corporation professionnelle, qui permet à la famille de jouer son rôle dans la nation et qui permet à l’Etat de remplir ses devoirs envers les familles aura sa loi ( que traduirait une charte parfaite ) qui est de vivre, de faire vivre ses membres et d’accomplir le service social qu’attend d’elle la collectivité, une hiérarchie, un bien commun, un lien d’union morale, qui est le travail commun, source d’un autre mutuel consentement »

Gaston BOIVIN et Maurice BOUVIER-AJAM, Vers une économie politique morale


L’entreprise dans la société corporative

 

3 « Tout acte de production a pour centre l’entreprise. Entreprise et foyer sont deux cellules-mères de la société. De même que le foyer est le lieu de la famille organisée, l’entreprise est le lieu du travail organisé. C’est au sein de l’entreprise que collaborent en vue d’un résultat commun les hommes de métiers souvent différents dont la convergence des techniques et des connaissances permet l’oeuvre de production.

L’entreprise est une cellule vivante, c’est l’unité économique naturelle résultant de l’accouplement des deux facteurs de production : capital et travail. Ce n’est pas uniquement une association de machines et de capitaux, mais une communauté d’hommes unis dans une tâche productrice, expression de leur solidarité, au service desquels sont mis machines et capitaux.

Le but de l’entreprise étant de satisfaire un besoin économique et d’assurer la subsistance de la famille ouvrière, tous les membres de l’entreprise ont entre eux un intérêt commun : la bonne marche de l’entreprise, condition de sa prospérité ... La collaboration au sein de l’entreprise constitue le soubassement de toute organisation professionnelle. »

Maurice-H. LENORMAND, Technique de l’organisation corporative

 

4 « L’entreprise, fondement de la profession, sera donc le premier cadre de la collaboration sociale.

Notons cependant qu’il ne s’agit aucunement de transférer le pouvoir de direction des mains du patron à celles des ouvriers, il s’agit néanmoins d’associer l’ouvrier à la marche économique de l’entreprise, de ne pas lui en faire mystère et de savoir recueillir son opinion.

La collaboration s’exprime par la constitution d’un Comité d’entreprise, d’un Comité social, si l’on veut, où sont représentés tous les éléments sociaux de l’entreprise, du patron au manoeuvre en passant par la gamme des techniciens et des ouvriers spécialisés. Ce Comité présidera à la vie sociale de l’entreprise. »

Maurice BOUVIER-AJAM, La doctrine corporative

 

5 « [Ce comité] veillera à l’application et au respect des lois sociales, des tarifs de salaires, à l’hygiène et à la sécurité, à l’examen des revendications individuelles. Il formulera son avis sur les fautes professionnelles, aidera au maintien de la discipline et veillera à la dignité ouvrière et à l’honneur professionnel dont il sera responsable..., traitera de tout ce qui se rattache à l’aspect social et récréatif de la vie ouvrière, au relèvement du niveau de vie.

[Ainsi organisé] il assure le respect de la constitution hiérarchique de l’entreprise, communauté de producteurs où chacun doit coopérer et donner son avis selon sa fonction, et dans la mesure de cette fonction, avec un objectif à sa portée. Chaque fonction ayant sa place déterminée dans la hiérarchie et par rapport à cette place, sa représentation fonctionnelle et sa participation au résultat du travail en commun.»

Maurice-H. LENORMAND, Technique de l’organisation corporative

 

Corporatisme et classes sociales

 

6 « La société corporative est essentiellement celle où est niée l’idée de classe et affirmée l’idée de profession. »

Maurice BOUVIER-AJAM, La doctrine corporative

 

7 « Abandonnant tout ensemble le principe de l’individu isolé devant l’Etat et la pratique des coalitions ouvrières et patronales dressées les unes contre les autres, il [ l’ordre nouveau ] institue des groupements comprenant tous les membres d’un même métier : patrons, techniciens, ouvriers. Le centre du groupement, n’est donc plus la classe sociale, patronale ou ouvrière, mais l’intérêt commun de tous ceux qui participent à une même entreprise. »

Maréchal Philippe PETAIN, 1er mai 1941

 

8 « L’intérêt de chaque catégorie sera défendu, mais les défenseurs de cet intérêt seront en même temps ceux de la profession entière, et les intérêts des catégories seront ainsi appréciés en fonction des intérêts supérieurs de la corporation elle-même. »

Maurice BOUVIER-AJAM, La doctrine corporative

 

9 « Le principe du syndicat unique et obligatoire par catégorie nous semble le plus conforme aux exigences de la construction corporative »

Maurice BOUVIER-AJAM, La doctrine corporative

 

10 « Le syndicat doit subsister. Mais, en s’intégrant à la corporation, il changera de caractère. Le syndicat d’hier [ était ], avant tout, un groupement d’intérêts. Au reste, comment un syndicat patronal aurait-il pu se donner d’autre règle que la sauvegarde des prérogatives capitalistes, et un syndicat ouvrier un autre but que l’augmentation des salaires et la réduction du temps de travail, quand le premier n’était qu’une société de patrons dont les ingénieurs et les techniciens, principaux artisans du progrès économique, avaient été exclus, et le second, une société d’ouvriers qui avait souvent rejeté de son sein jusqu’aux chefs d’équipe ? Ni l’un ni l’autre n’avaient qualité pour parler au nom de la profession, pour représenter le travail. Ils ne représentaient que des intérêts, légitimes sans doute, mais antagonistes, des intérêts de classe que chacun d’eux élevait d’ailleurs à la plus grande universalité. Librement et spontanément associés au sein de la corporation, ils pourront, demain, coopérer dans l’exercice du service social »

Charles SPINASSE, Le Rouge et le Bleu

 

11 « Le régime libéral et capitaliste a permis la lutte des classes et l’antagonisme entre collaborateurs d’une même entreprise parce qu’il ne partait pas d’une affirmation de l’égalité des forces en présence. C’est ce régime qu’il convient non plus de canaliser mais de dépasser. Ce dépassement, qui seul permettra l’avènement d’une ère de collaboration totale, de coopération véritable, nécessite d’abord le changement de nature du contrat de travail. Il faut qu’il cesse d’être un contrat de louage pour prendre un caractère de contrat d’association.

Ceci ne met aucunement en péril la méthode de la monogestion qui caractérise l’entreprise française. Mais l’ouvrier ne sera vraiment un coopérateur dans l’entreprise que si, à côté de son salaire défini et protégé par la corporation, il touche la part qui lui revient dans le résultat de la production. »

Maurice BOUVIER-AJAM, La doctrine corporative

 

La doctrine corporative et l’Etat

 

12 « L’autorité d’un pouvoir fort, l’histoire le démontre, est indispensable au bon fonctionnement de l’organisme corporatif

Maurice BOUVIER-AJAM, La doctrine corporative

 

13 « Tout système corporatif suppose, pour fonctionner correctement, l’arbitrage supérieur et impartial de la puissance publique - disons plus simplement qu’il postule un Etat fort . »

Charles ROUSSEAU, L’Hermine de mars 1935

 

14 « L’Etat fort du régime corporatif, c’est d’abord l’Etat non surmené qui a confié aux organismes corporatifs la charge de tous les grands services d’intérêt commun, gardant pour lui contrôle et police. D’où une déconcentration. »

Maurice BOUVIER-AJAM, La doctrine corporative

 

15 « Le corporatisme affirme ses volontés décentralisatrices. La corporation groupe les entreprises d’un même métier, d’abord localement, puis régionalement, et enfin nationalement. La corporation régionale est la pièce maîtresse du système. »

Maurice BOUVIER-AJAM, La doctrine corporative

 

16 « On peut, au fond, distinguer trois systèmes à peu près également préconisés par les théoriciens de l’organisation régionaliste. Le premier, qu’on peut appeler système fédéral, est recommandé généralement par les régionalistes les plus modérés encore mal libérés des idées étatistes ; le second peut s’appeler système synodal et il est généralement recommandé par les régionalistes protestants : les préfets, formant un corps administratif supérieur, éliraient parmi eux les gouverneurs des régions, qui garderaient leurs fonctions préfectorales tout en accédant à ce titre supérieur. Enfin, le troisième système, auquel nous nous sommes ralliés dans notre conférence au Cercle d’Etudes Nationales ( 1936 ), qu’on peut appeler système romain, est inspiré par l’exemple de l’Eglise Catholique et consiste à nantir une ville principale de la région d’un gouverneur, nommé par le pouvoir central parmi les préfets, ayant l’administration préfectorale de son département plus l’autorité administrative sur les autres préfets de la région : à la manière d’un archevêque maître de son diocèse et supérieur hiérarchique des diocèses rattachés à sa mître archiépiscopale. »

Maurice BOUVIER-AJAM, La doctrine corporative

 

17 « L’organisation corporative ainsi définie comporte donc essentiellement : une affirmation de l’artisanat à côté de l’industrie, une négation de l’idée de classe et une affirmation de l’idée de collaboration, une soumission de l’idée de concurrence à l’idée de confraternité, une affirmation de la communauté d’intérêts au sein de la profession illustrée notamment par la patrimonialité corporative, un rejet de l’étatisme et une pratique de la décentralisation et de la déconcentration, l’attribution à la corporation des pouvoirs législatif ( droit de se donner une charte et de prendre des règlements ), exécutif ( droit de promouvoir les règlements ) et judiciaire ( sanctionner l’exécution des règlements et arbitrer les différents professionnels ). La pièce maîtresse doit être le Conseil corporatif régional. »

Maurice BOUVIER-AJAM, La doctrine corporative

 

La fin des corporations et le retour du corporatisme

 

Par l’édit de février 1776, TURGOT supprime les corporations françaises :

 

18 « Article 1er : Il sera libre à toutes personnes, de quelque qualité et condition qu’elles soient, même à tous étrangers, d’exercer dans tout notre royaume telle espèce de commerce et telle profession d’arts et métiers que bon leur semblera, même d’en réunir plusieurs; à l’effet de quoi nous avons éteint et supprimé tous les corps et communautés de marchands et artisans ainsi que les maîtrises et jurandes, abrogeons tous privilèges, statuts et règlements donnés aux dits corps et communautés. »

 

Le corporatisme moderne s’oppose aux Lumières et à la Révolution française :

 

19 « Il faut bien dire que si les physiocrates avaient pu vaincre la corporation, ils le devaient sans doute au désir de lucre de certains chefs d’entreprise, à la politique des banquiers et des Anglais, à l’attitude de certains compagnonnages, mais surtout au recul de la foi chrétienne, qui avait été le ciment de la société médiévale comme la foi politique est celui de la société moderne et qui avait soumis les corporations au service de l’intérêt général, imposant le respect de la notion de juste valeur et de juste prix, répandue par la théologie médiévale, ce qui assurait une certaine conformité entre l’activité corporative et les exigences du bien commun; et aussi au renoncement à la séparation traditionnelle entre l’économique et le politique, conséquence de la législation colbertienne aggravée par la théorie du despotisme éclairé. La philosophie du XVIIIe siècle a sapé l’édifice avant de le condamner ... Le condamnant dans ces conditions, elle s’est condamnée elle-même. »

Maurice BOUVIER-AJAM, La doctrine corporative

 

20 « La renaissance de l’école corporative est née des travaux et de l’influence personnelle de Frédéric LE PLAY, qui n’alla jamais jusqu’au corporatisme, mais se contenta de combattre les principes économiques et sociaux de la Révolution française, concluant par la nécessité de créer un mouvement intense de christianisation qui, rétablissant les notions de juste prix et de juste contrat, susciterait en chacun l’état d’esprit favorable à la charité et à l’union. Il restaure le principe d’autorité-devoir, celui de groupement, celui de hiérarchie sociale et professionnelle.

Les disciples de LE PLAY entendirent tirer des conclusions de l’oeuvre du maître susceptibles d’aboutir rapidement à des résultats pratiques. Le comte Albert de MUN se prononça en faveur d’une réorganisation corporative. Il eut pour ami et collaborateur celui qui devait devenir le plus grand théoricien de la théorie corporative moderne, le marquis de LA TOUR DU PIN. Ils eurent immédiatement l’appui d’un Frère de Saint-Vincent de Paul, Maurice MAIGNEN, fondateur des cercles ouvriers catholiques, et d’un patron catholique, dont la cause est actuellement instruite à Rome pour la béatification, Léon HARMEL. 

LA TOUR DU PIN appuyait toute sa doctrine pratique sur l’observation de l’organisation française sous l’ancien régime et sur le rôle de l’Eglise de France dans les siècles passés. Toutes leçons que comprit parfaitement le Pape Léon XIII qui, par son encyclique Rerum Novarum ( la première des « encycliques sociales », NDLR ), déclare que l’abolition des corporations avait été une des causes les plus regrettables de la misère ouvrière. »

Maurice BOUVIER-AJAM, La doctrine corporative

 

Qui est Maurice BOUVIER-AJAM ?

 

Maurice BOUVIER-AJAM fut, pendant la période « vichyste » le directeur de l’Institut d’études corporatives et sociales (IECS). L'institut disparaît juste avant la Libération et son directeur est incarcéré pendant une année. S’éloignant de la doctrine corporatiste tout en continuant à nourrir une vive critique du capitalisme, Maurice BOUVIER-AJAM se rapproche alors du Parti Communiste Français et collabore au Centre d’Etudes et Recherches Marxistes (CERM) avec lesquels il prendra là aussi ses distances en fin de carrière.

 

 

AETES association des experts du travail, de l’emploi et de la santé